Mélodie 6 est un récital qui témoigne des murs compliquées de la race humaine. Les quatre acteurs mélangent leur voix à la musique savante ou bricolée par six compositeurs-interprètes pour offrir au spectateur un voyage onirique au cur de l´humanité. Un véritable délice sonore.
Sur la scène du Rio, plongée dans une lumière rouge tamisée, les artistes regardent le public s´installer. Quelques notes de mandoline, et un homme à la peau d´ébène s´écrit : " Ouais j´y vais. J´y vais. J´vais y aller. ". L´acteur Dieudonné Niangouna prête sa voix au texte de Natacha de Pontcharra. Où doit-il aller ? On ne le saura jamais. Les mots s´enferment dans un imbroglio incompréhensible, sorte de théâtre du silence où seul l´auteur détient la clé. La voix s´emporte accompagnée d´une dérive sonore. Le saxophone hurle, la guitare pleure des sons électriques. L´homme rentre dans sa coquille, ressort froidement puis capitule.
Hissée sur un chariot élévateur façonné trône africain, Andrée Tainsy se transforme en mamie conteuse. Du haut de ses 93 ans, cette actrice célèbre pour sa prestation dans " Sous le sable " de François Ozon, conte " la légende de l´Etang , des fleurs et des parfums " de Sony Labou sur Tansy. Dans ce texte sur la création du monde, l´homme affirme son égocentrisme. Son unique plaisir serait d´être seul au monde loin de la faune et la flore qui l´entourent. Magicien des sons, Alfred Spirli, fait entrer en piste une collection de jouets mécaniques. Son adresse à manier ces objets enfantins nous emporte dans un monde onirique. Bruits de la nature, de la vie, la voix chante les larmes de l´homme incapable de vivre dans la solitude.
Le musicien continue sa parade sonore dans un tout autre registre. " La litanie des médicaments "d´Eugène Durif nous transporte dans la folie médicamenteuse d´un homme maniaco-dépressif. Lithium, Dogmatol, prolaxe, zorbital, les six compositeurs-interprètes, véritables provocateurs de fiction musicale, illustrent cette démence par un rock psychédélique. Attitude pulsionnelle en regard des textes. " Parfois, je me disais que cette souffrance, la souffrance était liée à l´être même de l´homme ", conclut l´acteur et metteur en scène de mélodie 6, Jean-Paul Delore. Face à cette sombre peinture de l´homme occidental, on hésite finalement entre rire et malaise.
La salle est plongée dans la nuit. Seule une lumière bleutée
agrémentée du scintillement d´étoiles tournoyantes, éclaire
le saxophoniste dressé sur le haut de la scène. Quelques notes
de douceur et d´apaisement avant de se replonger dans l´absurdité humaine.
Isabelle Vellay et Andrée Tainsy s´échangent les mots du texte
de Jean-Yves Picq. Un début en espéranto fige le public dans une
totale incompréhension. Seule l´esthétique de la langue et des
sons du clavier de Xavier Garcia laisse présager la gravité des
paroles prononcées.
" Tu nous as dis pourtant " parle de la guerre au Rwanda, d´un enfant
qui voit sa famille massacrée et de l´indifférence que lui portent
les soldats " sauveurs ". Une hymne douloureuse qui exprime encore
les vices de la nature humaine.
Cent petits textes pour raconter la vie de Nadine, Elise, Paul, Marie-Jo et les autres. Les quatre acteurs unissent leurs voix pour décrire les choses simples de la vie. Un peu longue, la scène est pourtant savoureuse.
Séverine