Mélodie 6

Mélodie 6 : une fiction musicale

Une mise en scène grave et loufoque de Jean-Paul DELORE

Mélodie 6 est un récital qui témoigne des mœurs compliquées de la race humaine. Les quatre acteurs mélangent leur voix à la musique savante ou bricolée par six compositeurs-interprètes pour offrir au spectateur un voyage onirique au cœur de l´humanité. Un véritable délice sonore.

Scène 1 :

Sur la scène du Rio, plongée dans une lumière rouge tamisée, les artistes regardent le public s´installer. Quelques notes de mandoline, et un homme à la peau d´ébène s´écrit : " Ouais j´y vais. J´y vais. J´vais y aller. ". L´acteur Dieudonné Niangouna prête sa voix au texte de Natacha de Pontcharra. Où doit-il aller ? On ne le saura jamais. Les mots s´enferment dans un imbroglio incompréhensible, sorte de théâtre du silence où seul l´auteur détient la clé. La voix s´emporte accompagnée d´une dérive sonore. Le saxophone hurle, la guitare pleure des sons électriques. L´homme rentre dans sa coquille, ressort froidement puis capitule.

Scène 2 :

Hissée sur un chariot élévateur façonné trône africain, Andrée Tainsy se transforme en mamie conteuse. Du haut de ses 93 ans, cette actrice célèbre pour sa prestation dans " Sous le sable " de François Ozon, conte " la légende de l´Etang , des fleurs et des parfums " de Sony Labou sur Tansy. Dans ce texte sur la création du monde, l´homme affirme son égocentrisme. Son unique plaisir serait d´être seul au monde loin de la faune et la flore qui l´entourent. Magicien des sons, Alfred Spirli, fait entrer en piste une collection de jouets mécaniques. Son adresse à manier ces objets enfantins nous emporte dans un monde onirique. Bruits de la nature, de la vie, la voix chante les larmes de l´homme incapable de vivre dans la solitude.

Scène 3 :

Le musicien continue sa parade sonore dans un tout autre registre. " La litanie des médicaments "d´Eugène Durif nous transporte dans la folie médicamenteuse d´un homme maniaco-dépressif. Lithium, Dogmatol, prolaxe, zorbital, les six compositeurs-interprètes, véritables provocateurs de fiction musicale, illustrent cette démence par un rock psychédélique. Attitude pulsionnelle en regard des textes. " Parfois, je me disais que cette souffrance, la souffrance était liée à l´être même de l´homme ", conclut l´acteur et metteur en scène de mélodie 6, Jean-Paul Delore. Face à cette sombre peinture de l´homme occidental, on hésite finalement entre rire et malaise.

Scène 4 :

La salle est plongée dans la nuit. Seule une lumière bleutée agrémentée du scintillement d´étoiles tournoyantes, éclaire le saxophoniste dressé sur le haut de la scène. Quelques notes de douceur et d´apaisement avant de se replonger dans l´absurdité humaine.
Isabelle Vellay et Andrée Tainsy s´échangent les mots du texte de Jean-Yves Picq. Un début en espéranto fige le public dans une totale incompréhension. Seule l´esthétique de la langue et des sons du clavier de Xavier Garcia laisse présager la gravité des paroles prononcées.
" Tu nous as dis pourtant " parle de la guerre au Rwanda, d´un enfant qui voit sa famille massacrée et de l´indifférence que lui portent les soldats " sauveurs ". Une hymne douloureuse qui exprime encore les vices de la nature humaine.

Final :

Cent petits textes pour raconter la vie de Nadine, Elise, Paul, Marie-Jo et les autres. Les quatre acteurs unissent leurs voix pour décrire les choses simples de la vie. Un peu longue, la scène est pourtant savoureuse.

Séverine